La non-proportionnalité des symptômes conséquent à un système postural dégradé
Par Romain HENAUT, ostéopathe D.O.
Quand on pense à la posture, la logique voudrait que plus le patient est tordu dans l’espace plus les symptômes soient intenses. Pourtant la réalité clinique en est tout autre : l’intensité d’un trouble postural n’est pas toujours corrélée à l’intensité de la douleur ou à l’inconfort ressenti.
Posture dégradée et contraintes sur l’appareil locomoteur
Lorsque le système postural se dégrade, le corps adopte une position moins efficace, souvent au prix de compensations musculaires et articulaires.
Ces compensations imposent des contraintes sur l’appareil locomoteur :
• tensions de certains muscles
• Pressions anormales sur les articulations
• Déséquilibres dans la répartition des appuis
En théorie, plus la dégradation du système postural est importante, plus ces contraintes devraient provoquer des douleurs. Mais en pratique, ce n’est pas si simple.
Un paradoxe fréquent : petits défauts, grandes douleurs
Il existe des situations où une petite perturbation de l’un des capteurs du système postural — les yeux, les dents ou la peau — peut provoquer de grandes douleurs.
Exemple : Un léger défaut de convergence oculaire peut entraîner des tensions cervicales, des migraines ou des douleurs lombaires très fortes chez un sujet qui travaille sur un ordinateur toute la journée
À l’inverse, certaines personnes présentent :
• Une occlusion dentaire très délabrée ou des dents manquantes
• Une convergence oculaire très faible
• Des cicatrices qui perturbent la peau
Et pourtant… elles ne ressentent que peu ou pas de douleurs.
Pourquoi cette non-proportionnalité des symptômes ?
Plusieurs facteurs peuvent l’expliquer :
– Capacité d’adaptation individuelle : certains organismes compensent mieux que d’autres grâce à leur souplesse articulaire, leur force musculaire ou leur endurance.
– Seuil de perception de la douleur : chaque individu a une sensibilité différente aux signaux douloureux.
– Facteurs psycho-émotionnels : le stress, la fatigue ou l’état émotionnel peuvent amplifier ou atténuer la sensation de douleur.
L’importance d’une évaluation globale
Ce phénomène de non-proportionnalité des symptômes rappelle qu’il ne faut pas se fier uniquement à l’intensité des douleurs pour évaluer la dégradation du système postural.
• Des douleurs intenses peuvent révéler un défaut minime mais mal compensé
• Un trouble important peut passer presque inaperçu si le corps s’y est adapté
D’où l’importance d’un bilan postural complet, qui prend en compte l’ensemble des capteurs (œil, dents, peau) et non seulement l’aspect visible ou la plainte exprimée.
En posturologie, la douleur n’est pas toujours proportionnelle à la dégradation du système postural. Ce constat souligne la complexité de notre système postural et la nécessité d’une approche individualisée, où l’on traite la cause et pas seulement l’intensité du symptôme.